“On est puceau de l‘horreur
comme on l‘est de la volupté”

Louis Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit.

Payer la Guerre

Allemands ou Français, les belligérants misent sur une guerre courte. Ainsi, un peu à l'image de ses soldats qui partent se battre “ la fleur au fusil ”, entassés dans des wagons enrubannés qui les mènent au front, la France n'imagine pas qu'elle est sur le point de s'engager dans un bourbier. Trop peu préparée, ayant mal appréhendé le dispositif et les ressources de l'ennemi, le pays est surpris, comme pris à la gorge par cette guerre qui prend vite une tournure différente de celle envisagée. Heurtée par les réalités d'un conflit qui s'annonce bien plus long que prévu, bien plus coûteux, la France doit rapidement trouver les moyens de payer cette guerre, de faire face aux manques ainsi qu'aux dépenses militaires toujours croissantes.



La campagne de l'or

Alimenter l'effort de guerre

Privée d'une grande part de sa main-d'œuvre masculine (réquisitionnée dans l'armée) et subissant l'occupation de certaines zones géographiques du territoire national où l'activité industrielle s'était implantée, la France se trouve dans une situation délicate avec un taux d'importation supérieur à son taux d'exportation.

Pour alimenter l'effort de guerre, le gouvernement français met en place une vaste campagne de l'or. Cette dernière incite la population à vider ses bas de laine... bref, à échanger son or contre des billets. Le métal précieux s'inscrit comme la promesse d'une victoire contre l'ennemi, comme le gage d'une paix retrouvée.




Les emprunts de la défense nationale

une guerre coûteuse

Estimant que la population paie déjà de lourds tributs, notamment celui du sang, le gouvernement français est opposé -au moins jusque 1916- à l'idée d'augmenter les impôts. Cependant, la guerre nécessite toujours plus de moyens. Elle est de plus en plus coûteuse. Outre à des aides extérieures, provenant des pays alliées, la France a recours à l'emprunt intérieur, auprès de sa population.


quatre emprunts de 1915 à 1918

Entre 1915 et 1918, le gouvernement français fait appel chaque année aux civils afin qu'ils souscrivent à un emprunt pour la défense nationale:

Novembre 1915: Premier emprunt de la Défense Nationale
Octobre 1916: Deuxième emprunt de la Défense Nationale
Octobre 1917: Troisième emprunt de la Défense Nationale
Octobre 1918: Quatrième emprunt de la Défense Nationale

Les emprunts rencontrent un vrai succès auprès de la population française, chez les civils comme chez les paysans. Cette forte mobilisation est pour beaucoup liée à la mise en place d'une propagande par l'affiche.




Une propagande par l'affiche

un vecteur d'information

Afin d'inciter la population française à participer à l'effort de guerre par la souscription à l'emprunt pour la défense nationale, une propagande active est orchestrée. Son support: l'affiche. Qu'elle soit en couleur ou en noir et blanc, composée de simples slogans ou enrichie d'illustrations, l'affiche est, à cette période de l'histoire où les technologies sont moins développées qu'aujourd'hui, un vecteur d'informations susceptible de s'adresser à tous. En ville comme à la campagne, on la diffuse partout.

Des illustrateurs comme Poulbot, Abel Faivre, Prouvé ou encore Hansi concourent vivement à la propagande par l'affiche en mettant leur art à son profit.


Une arme de mobilisation

La propagande par l'affiche convoque des références et des valeurs communes. Diabolisant l'ennemi, elle vise à mobiliser l'esprit des français en mettant en avant la légitimité du combat auquel se livre la France, celui du bien contre le mal. On sollicite l'affect des français en rappelant le sacrifice des soldats. On invite à être solidaire des combattants mobilisés, là-bas, loin de chez eux... Participer à l'emprunt revient à hâter le retour à une situation de paix, et donc celui des soldats dans leur foyer, auprès des leurs.

L'engouement que bons et emprunts suscitent auprès de la population française est également à attribuer à l'influence de l'école sur les familles.




Finalement…

Le bilan

Le bilan est lourd... très lourd. De 1914 à 1919, les dépenses de la France, très largement couvertes par l'emprunt, s'élèvent à plus de 220 milliards de francs-or, dont près de 60 % incombent aux dépenses liées à la guerre.